Epilogue

 

L'âne trottinait, bienheureux sous le soleil revenu. La neige du matin disparaissait rapidement.

Léo et son grand-père suivaient à pied, emmitouflés dans leur châle. Léo pressait le pas dans la

hâte d'arriver avant la nuit à la qala de Daoud et Davida. Il savait aussi que son départ d'Afghanistan

était imminent. Et la séparation aussi ; mais il essayait de n'y point trop penser et de chasser cette

perspective douloureuse. La rivière était proche ; à présent, il en entendait le chant; un oiseau aux

plumes bleues posé sur la branche d'un acacia les regardait venir, sans crainte ; quelques truites

bondirent, semblant les saluer. Le soleil se couchait derrière le Koh-i-Baba comme ils arrivaient

devant le grand portail debois de la qala. Tout était silence. L'âne lança son braiement. La porte

s'ouvrit. Une étrange tranquillité régnait à l'intérieur.

- Tiens, mais je n'entends pas le doux bruit du baby-foot. Ah, mais le chant de la flûte ? Le babillage

des enfants ? Quoi, plus de trompette pour nous accueillir ? Plus de cithare?

Alors Daoud, prince de blanc vêtu, apparut sur la plus haute terrasse, un livre relié de toile

ouzbèque à la main - Marc Aurèle ou Hâfez ? " Ne soyez pas tristes, ils sont partis dès ce matin,

partis vers l'Occident ; à cette heure-ci ils devraient être dans l'avion qui les ramènera en France.

- Ou en Polynésie, ajouta Grand-père. Qui le sait ?

Tous les trois étaient maintenant assis sur les coussins verts du petit salon. Daoud fumait la pipe à

eau, silencieux et mélancolique comme à son habitude. Le thé était servi; mais pas le jus de grenade :

à présent, Davida jouait de la cithare dans une bienheureuse vallée du Nouristan, pour le regard de

son aimé . Au fond de lui, Léo savait bien que les choses devaient ainsi arriver.

- Que vas-tu faire, Daoud?

- Attendre.