dans la vallée : à Tell Amarna

Les notes, fines, élégantes, montantes, chacune tirant à elle la précédente par une

liaison à peine sensible, semblent accéder au plus haut de l'humain. Celles de la main

gauche, puis celles de tout l'orchestre, forment le socle discret, massif, tellurien, sur

lequel prennent appui les colonnes exaltées par la main droite.

Ces notes pianistiques s'élèvent du désert.

L'homme, là-haut, sur la falaise qui domine le Nil, Tell El Amarna et les vestiges

d'Akhénaton et de Néfertiti, est assis sur le sable, au risque des scorpions qu'il ignore,

transcendé qu'il est par le 2e mouvement de ce concerto pour piano de Mozart. La

musique lui ouvre le passage vers un monde dégagé de la contingence, de l'incertitude

humaine ; elle est la Porte qui ouvre sur l'horizon. Akhétaton.Il se laisse peu à peu envahir

par le sable balayé du désert, par la lumière solaire qui fut celle d'Aton, par l'image de

Néfertiti exhalée par les ruines immuables de la vallée et les tombes éclairées du soleil de midi :

Les heures passent ainsi dans l'anéantissement charnel. L'homme a ôté le fil qui le reliait

à Mozart. La musique lui a ouvert les portes du silence. Seul le murmure de l'air, à présent,

emplit sa pensée et participe à la vie interne de chacune de ses cellules, au mouvement de son

sang, aux influx de ses fibres nerveuses. Il a arrêté toute connexion avec la vie des hommes ,

avec sa propre vie, son passé d'enfant, ses douleurs, ses inquiétudes et ses angoisses. Mêlé au

sable du passé, il sent monter en lui, venant du fond de la vieille Egypte, la force, la joie et la stabilité.

 

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